22e séminaire – 2013
Instruire, éduquer : comment s’institue le sujet dans la cité ?
Discours d’ouverture
Éducation et instruction relèvent toutes deux de la transmission, c’est à dire de ce qu’apportent ceux, qui ont déjà derrière eux une présence au monde assez longue, et qui représentent de ce fait l’humanité telle qu’elle se poursuit en prolongeant le passé, à ceux qui font leurs premières armes dans la vie, et représentent l’humanité telle qu’elle se construit pour élaborer l’avenir.
Etienne Hollier-Larousse, Président de l’AVVEJ
Introduire une telle question comporte au moins deux risques, voire deux impasses : celui détourner autour du pot sans savoir par quel bout entrer dans le sujet ; celui de rentrer dedans et de ne plus savoir comment en sortir. Une manière peut être de s’y prendre serait de conjuguer ces deux approches, c’est-à-dire d’y faire quelques incursions sans jamais trop s’y aventurer. Aucun doute également sur le fait que chacun de ces termes ait été choisi volontairement, sans pourtant forcément bien réaliser l’explosivité du cocktail que représente le fait de les articuler ensemble dans une même phrase. Car chacun des termes utilisés dans ce titre comporte en lui une énigme : qu’est-ce qu’éduquer, qu’est-ce qu’instruire, qu’est-ce qu’un sujet, de quelle cité s’agit-il, comment ça s’institue un sujet ?
Serge Raguideau, ancien Directeur général
Éduquer ou instruire ?
Comparer la profession d’instituteur avec celle d’éducateur, ou vice-versa, n’est pas une première. Plusieurs chercheurs se sont livrés à ce jeu de miroirs d’autant plus tentant qu’il y a de nombreuses ambiguïtés dans la notion d’éducation et qu’il existe bien une guerre d’images entre les deux corps de métier : les uns accusant les autres d’être des amateurs, sans aucun sens de la pédagogie ; les autres accusant les premiers de ne pas avoir le sens de l’équipe, d’être prisonniers des rapports de maître à élève et d’avoir une mentalité de fonctionnaire.
Matthias Gardet, historien.
Éduquer, instruire, d’accord, mais surtout transformer
L’idée de l’enfant ou de tout autre sujet en tant qu’ « acteur » de son devenir, de son propre changement, de sa vie tout simplement, n’est en effet pas une idée sans conséquence. Elle suppose que le travail institutionnel et social, le travail spécialisé qui s’opère autour de lui, en tienne compte. Dès lors, le travailleur éducatif et social ne cherche plus à imposer sa marque, son autorité, son pouvoir et sa volonté directement, mais ne peut plus le faire qu’indirectement, c’est à dire dans un cadre artificiel qui devient dès lors celui du travail social.
Laurent Ott, philosophe
On ne naît pas élève, on le devient
Pourquoi les enfants et les adolescents sont-ils si nombreux à rencontrer des difficultés d’adaptation dans le milieu scolaire et à résister autant à entrer dans les apprentissages ? Le contexte sociétal, tout autant que l’évolution des repères anthropologiques en éducation, interroge l’école et ses finalités. Nombreux sont les jeunes qui ne possèdent pas les pré-requis éducationnels et symboliques pour soutenir un investissement scolaire. Ils s’enferment alors dans des réticences qui se structurent à la longue en radicalité oppositionnelle. Une école plus lente que les jeunes eux-mêmes à s’adapter au contexte sociétal auquel elle est censée les préparer. Une école que l’on voudrait résiliente, susceptible de soutenir la personnalisation et l’épanouissement des jeunes qu’elle accueille
Michel Defrance, Directeur d’ITEP
Question de langage
En tant qu’orthophoniste, je vais commencer par vous présenter rapidement les principaux troubles spécifiques que l’on observe chez l’enfant en orthophonie, et leurs incidences sur la scolarité, ensuite je vous parlerai plus concrètement de mon travail à l’AVVEJ, et enfin, je terminerai par la présentation d’un enfant dont je m’occupe actuellement.
Hélène Moreau, orthophoniste SIOAE 75
L’envie d’apprendre, causes et effets de l’échec scolaire
Dans la seconde enfance, la scolarisation impose les apprentissages de la lecture, de l’écriture, du calcul, et de la logique rationnelle. Cette étape cruciale suppose la mobilisation d’une énergie psychique, plus ou moins grande selon ses capacités intellectuelles, de façon à ce que le début des apprentissages scolaires se fasse avec succès. L’enfant qui réussit, obtient des gratifications personnelles narcissiques, par rapport à ses aspirations. Dans un tel contexte, l’enfant se désintéresse de l’écrit, et il commence à ressentir un certain dégoût pour l’école. Son désir d’apprendre s’étiole. Mais, qu’en est-il de ce désir d’apprendre et de ces avatars, lors de la scolarité ?
Hervé Benhamou, psychiatre SIOAE 75
Le dossier 332
Peut-on écrire son autobiographie avec les mots des autres ? Raconter une enfance à travers le discours des assistantes sociales ? Suivre la croissance d’un corps sur des tickets de caisse consignés sous la catégorie « Vêture »? Noëlle Pujol, séparée à la naissance de ses parents, lit en off une sélection de lettres du dossier de la DDASS qui porte son nom. Sur la rigidité du langage administratif, elle monte de beaux plans fixes tournés en Ariège, où elle a grandi.
Entretien avec Noëlle Pujol, artiste et réalisatrice